Les croupiers réclament des casinos non-fumeurs
L’espérance de vie des employés de casinos est inférieure de 15 ans à la moyenne nationale. Premier accusé : le tabagisme passif.
D’ABORD CHASSEUR, puis croupier et chef de table, André Raspino aura passé 43 ans de sa vie dans l’atmosphère enfumée des casinos. Ce retraité niçois s’inquiète aujourd’hui pour sa santé, après avoir enterré cinq anciens collègues ces dernières années. « Certains sont morts dans la force de l’âge, victimes d’infarctus ou de cancers, dit-il. D’autres, plus vieux, n’avaient jamais fumé. À chaque fois, je voyais là un coup du destin : je ne savais rien des méfaits du tabac. »
Ce n’est qu’à la fin de l’année 2004 que Force ouvrière, le syndicat majoritaire dans la branche, se saisit du combat contre le tabagisme passif. « Nous avions remarqué un afflux de plaintes auprès des délégués du personnel, explique David Rousset, responsable national de FO Casinos. Les salariés disaient souffrir de l’exposition permanente à la fumée de cigarettes. » Fumeurs ou non, les employés se plaignent de l’odeur écoeurante qui imprègne leurs cheveux et leurs uniformes, mais surtout des yeux et de la gorge qui piquent, de maux de tête, de nausées ou de troubles respiratoires. Et de l’inquiétude grandissante pour leur santé.
Même les clients se plaignent
Une étude de la caisse complémentaire de retraite, remise au même moment, finit de convaincre le syndicat. Le document montre que les employés de casinos meurent en moyenne à 63 ans. Soit au moins quinze ans plus tôt que la population française... « Nous savions que le travail de nuit et le stress des salles de jeux faisait perdre quelques années d’espérance de vie, précise David Rousset. Mais avec ces données la situation devenait, à nos yeux, alarmante. »
Alors, lorsqu’il apprend que Xavier Bertrand envisage d’accorder une dérogation aux casinos dans l’application d’une future interdiction de fumer dans les lieux publics, le syndicat bondit. Deux plaintes pour non-respect de la loi Evin sont aussitôt déposées. Elles visent le casino d’Enghien-les-Bains, en région parisienne, et celui du Ruhl, à Nice. Tous deux sont entièrement accessibles aux fumeurs. Une vingtaine d’autres procédures sont prévues dans les semaines à venir, selon Gérard Audureau, le président de Droits des non-fumeurs, association qui s’est portée partie civile.
« Les fumeurs, excités par le jeu, allument cigarette sur cigarette, se plaint Joanna Dawson, 39 ans, chef de table au casino de Mandelieu (Alpes-Maritimes). Certains soirs, on travaille dans un tel brouillard que même les clients se plaignent. » Après neuf ans passés à surveiller les joueurs de roulette, de black jack ou de poker, cette Britannique ne supporte plus de « souffrir physiquement ». « Des femmes enceintes sont aussi obligées de supporter cela », se révolte-t-elle.
Chiffre d’affaires menacé
Pourtant, les directeurs de casinos refusent catégoriquement l’interdiction de fumer qui nuira, selon eux, au chiffre d’affaires du secteur. « Les joueurs resteront chez eux pour fumer et jouer sur Internet », prédit Patrick Partouche, président du directoire du groupe Partouche, tout en rappelant que les casinos français ont versé 106 millions d’euros en 2005 au titre de la CSG. Et que même les casinos de Las Vegas « restent des espaces de liberté ».
Source Delphine CHAYET . Publié le 03 octobre 2006 le figaro
je suis une fumeuse; mais je préfèrerai serieusement travailler dans un casino non-fumeur! pour nous, croupiers, et pour les clients aussi...