Au nom du développement économique, oublions le Casino!
Il y a bientôt un an, Loto-Québec a abandonné son projet de déménager le Casino de Montréal au bassin Peel à Pointe Saint-Charles.C’était la bonne décision.
Au moment où certains souhaitent ranimer ce projet, il est utile de se rappeler pourquoi il a été enterré. D’abord, la grande majorité de la population du Sud-Ouest de Montréal y est opposée. Deuxièmement, le rapport interministériel coordonné par Guy Coulombe et publié au début de mars 2006 était accablant : le projet était mal ficelé et n’avait pas fait l’objet de consultations publiques. Troisièmement, la Direction de la Santé publique de Montréal avait émis de sérieuses réserves.
Le Parti Québécois s’y est opposé dès le début pour ces trois raisons mais aussi et peut-être surtout parce qu’un casino, comme tous les jeux de hasard, ce n’est pas du développement économique. Un centre recréotouristique, oui, une salle de spectacle, oui, mais un casino non. On n’y fabrique rien, on n’y produit rien, on n’y ajoute pas de valeur à des produits existants. Au mieux, un casino est un lieu de perception de taxes volontaires déguisées, dont une partie importante vient de joueurs compulsifs; au pire, un casino est un aimant pour le crime organisé, qui peut y blanchir de l’argent obtenu illégalement.
L’engouement pour ce projet, qui ne se dément pas dans certains milieux, relève d’une conception du développement économique qui ne colle pas à la réalité montréalaise ni à la réalité du Sud-Ouest de Montréal. La présence du Cirque du Soleil, quoi qu’elle fût de courte durée, explique peut-être cet engouement. Or le Cirque, dont nous sommes tous fiers et qui est l’une des grandes cartes de visite du Québec sur la scène internationale, n’avait vraiment pas besoin de ce projet pour poursuivre son essor (Loto-Québec a dû payer cher le seul droit d’inclure le nom du Cirque dans le projet).
Si on est préoccupé par le développement économique de notre ville et de notre quartier, au lieu de s’inquiéter de l’avenir du Cirque du Soleil, on devrait se préoccuper davantage de la situation de tous ces jeunes cirques, jeunes artistes et entreprises culturelles en gestation, qui sont si nombreux dans le Sud-Ouest et ailleurs à Montréal. Avons-nous les moyens de les soutenir, créons-nous les conditions qui permettront aux jeunes créateurs et aux jeunes créatrices de percer comme les Guy Laliberté l’ont fait il y a 20 ans? Rappelons que le Cirque du Soleil a commencé petit. C’état un OBNL (organisme à but non lucratif) dont le potentiel a attiré l’attention d’un certain René Lévesque, également premier ministre à l’époque, qui a su les soutenir au bon moment.
Voici donc où se situe le défi de développement du Sud-Ouest de Montréal et de toute la Ville de Montréal. Au lieu d’attendre béatement de grands projets qui viendraient d’Ottawa ou de Québec comme on attend le messie, créons les conditions pour que vivent et s’épanouissent la créativité et l’innovation si présentes dans le Sud-Ouest. Tablons sur nos forces et donnons-nous les moyens de nos rêves.
Robin Philpot
source lavoixpopulaire.com le 18 2 2007