La Loterie romande risque de perdre ses sous
Le sort réserve des péripéties à la Loterie romande. Son président s’inquiète de la situation actuelle.
L’an prochain, la Loterie romande soufflera ses septante bougies. Mais c’est une institution mal en point qui fêtera son anniversaire. Selon Jean-Pierre Beuret, son président, elle est attaquée par l’administration fédérale qui veut saper les efforts des cantons dans le domaine de l’utilité publique. Pour lui, Berne veut tout simplement démanteler les jeux d’argent tels qu’ils sont pratiqués par les cantons. Pour faire passer son discours, il en a fait un ouvrage publié le 8 novembre.
500’000 francs distribués chaque jour ...
Créée en 1937, la Loterie romande distribue aujourd’hui près d’un demi million de francs par jour à des œuvres d’utilité publique: associations, culture, arts et sports. C’est la solution du «beau risque» adoptée par les cantons francophones, explique Jean-Pierre Beuret lors de la présentation de son ouvrage devant la presse, reprenant une expression québécoise. «C’est-à-dire que si les gens veulent jouer, il faut asservir le jeu à un beau destin: l’argent perdu doit retourner à la collectivité à laquelle appartiennent les joueurs.»
Une loterie en difficulté
La Loterie romande subit la concurrence des maisons de jeux et des paris sur Internet, qu’ils soient légaux ou non. Le système des casinos, Jean-Pierre Beuret s’en plaint d’ailleurs. Car leurs bénéfices sont versés dans les poches de leurs dirigeants et actionnaires. Et c’est ce système que la Berne fédérale voudrait voir appliqué au monde des loteries, et ce que dénonce Jean-Pierre Beuret.
Bataille de pouvoir
A la fin des années nonante, la Loterie romande et les cantons francophones avaient créé une société, la «Romande des Jeux» qui aurait été chargée de la gestion des casinos. En 2001, la Confédération en a décidé autrement en confiant les maisons de jeux à des sociétés privées par l’octroi de concessions. «A l’époque, des sondages avaient pourtant montré que 80% des Romands voulaient que les casinos soient d’utilité publique», souligne Jean-Pierre Beuret. Il constate de plus que les casinos ont des lobbies à Berne, ce qui n’est pas le cas de la Loterie romande. «Nous avons beaucoup de sympathisants parmi les parlementaires fédéraux. Mais c’est tout! Comme nous n’avons pas d’actionnaires, aucun parlementaire n’a d’intérêts particuliers à défendre dans la Loterie romande».
Les loteries auront besoin de l’informatique
Pour l’instant, la menace principale pour la Loterie romande est que la commission fédérale des maisons de jeux parvienne à interdire les loteries électroniques. «Les loteries du futur seront gérées par informatique», explique J-P Beuret. «Si les sociétés de loterie n’ont pas accès à ce support, elles vont devoir se cantoner aux jeux sur papier et vont péricliter. Le Conseil fédéral couvre avec autisme les agissements de sa commission des maisons de jeux qui harcèle et attaque la Loterie romande. C’est l’attitude de l’autruche éclairée, c’est-à-dire que le Conseil fédéral connaît les questions, mais il ne fait rien.»
Un prêche pour sa paroisse
Il va de soi que le livre de Jean-Pierre Beuret est un discours pour sa paroisse. «Mais il n’y a aucun intérêt particulier dans cette paroisse», précise-t-il. «Il s’agit avant tout d’une cause qui s’appelle l’intérêt public! J’ai aussi voulu donner mon opinion dans ce livre, mais ce n’est pas l’évangile», conclut le président de la Loterie Romande
Source leregional.ch Mathieu Signorell décembre 2006