Zurich et Bienne ressuscitent leurs envies de casino
SUISSE. Le Conseil fédéral devrait décider sous peu s'il veut remettre sur le tapis quelques concessions. Les régions qui n'ont rien obtenu en 2001 sont déjà en ébullition.
La fièvre monte dans les régions privées de casinos. Car le Conseil fédéral devrait décider sous peu s'il veut accorder de nouvelles concessions pour des maisons de jeu en Suisse. Dans les zones blanches sur la carte de la roulette en Suisse, les intéressés ne manquent pas. Zurich et Bienne en particulier piaffent déjà d'impatience.
Marché saturé?
Lors de l'octroi des premières licences, en octobre 2001, le Conseil fédéral avait chargé la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ) de faire le point sur le marché suisse cinq ans plus tard. Son rapport, confidentiel, a été remis en octobre dernier au conseiller fédéral Christoph Blocher, dont le département est responsable du dossier. Selon des informations parues dans la NZZ au début de cette année, la CFMJ, estimant que le marché est saturé, plaide pour le maintien du statu quo avec les 19 établissements existants.
Christoph Blocher souhaiterait, lui, ouvrir le jeu. Dans un premier temps, le Conseil fédéral doit décider s'il veut mettre de nouvelles licences sur le marché, et désigner les régions qui en profiteraient. Les projets définitifs ne seront choisis que plus tard.
Benno Schneider, directeur de la CFMJ, ne souhaite faire aucun commentaire qui puisse influencer une décision qui s'annonce délicate. La Fédération suisse des casinos, qui regroupe 17 des 19 maisons du pays, ne veut pas non plus s'avancer.
La pression la plus grande pour de nouvelles licences vient sans conteste de Zurich. Le canton avait été délibérément écarté lors de la première distribution en 2001, alors que trois casinos recevaient l'autorisation de s'implanter aux portes de la plus grande ville de Suisse, à Baden (AG), Pfäffikon (SZ), sur les bords du lac de Zurich et à Schaffhouse.
Un affront aux Zurichois
Un affront d'autant plus cuisant que ces trois cantons voisins se montrent très agressifs avec leur politique fiscale. Il n'est donc pas étonnant que les projets zurichois fleurissent. La concurrence interne sera rude. Trois sites sont en balance, un à l'aéroport de Kloten et deux au centre-ville. Zurich est intéressé avant tout par une licence B, la seule qui rapporte sa part sonnante et trébuchante d'impôts aux cantons.
Le maire de Bienne, Hans Stöckli, fait, lui, un autre calcul. Ainsi qu'il l'a expliqué dans Le Journal du Jura, il se réjouit tout particulièrement de l'interdiction la semaine dernière par la CFMJ des machines à sous «Tactilo» dans les bars et restaurants. Il espère en effet que la Loterie romande fasse pression en faveur de nouvelles concessions, car elle pourrait ainsi mettre en remplacement des Tactilo dans les casinos.
Le porte-parole de la Loterie romande, José Bessard, ne partage pas cette analyse: «Pourquoi les casinos, qui gagnent assez avec leurs machines à sous, devraient-ils installer des Tactilo?» La Loterie romande se déclare toutefois partante si le Conseil fédéral devait octroyer de nouvelles concessions. «Nous sommes prêts. Mais il revient aux cantons romands de décider entre eux quelle suite donner à ce feu vert», déclare José Bessard. S'il reconnaît que le Château d'Ouchy serait une possibilité, il ne veut pas s'avancer.
Outre Bienne, qui pousse déjà à la roue, Neuchâtel, le seul canton romand qui n'ait rien reçu en 2001, et Lausanne sont en effet des candidats naturels.
Avec la France, la Suisse a une des plus fortes densités de maisons de jeu en Europe. En 2001, le Conseil fédéral avait accordé 21 concessions. Les casinos de Zermatt et Arosa ont déjà fermé entre-temps. Les établissements dans les stations de Saint-Moritz et Davos sont à la peine aussi. Leurs jours pourraient même être comptés, car jusqu'à la fin 2006, ils ne livraient que 13,3% de leurs recettes à la Confédération, alors que le taux minimum est fixé à 40%. Ils ont bénéficié pendant quatre ans d'une réduction en raison de leur position décentralisée, mais le Conseil fédéral n'est pas disposé à prolonger cette exception.
Grâce à la proximité de la région milanaise, et son bassin de 7 millions d'habitants, le Tessin en revanche est devenu le haut lieu des jeux de hasard. Mendrisio, qui dépasse tous les grands casinos avec une licence A, Lugano et Locarno attirent à eux seuls 30% de la clientèle suisse, contre 53% pour la Suisse alémanique et 17% en Suisse romande.
Catherine Cossy
Mardi 16 janvier 2007
source letemps.ch